Sionis Entreprises avaient été récemment déplacées à Metropolis. Donc logiquement, et surtout sous la dernière demande de mon père, je m’y étais rendue. Tous étaient au courant que la fille de Roman Sionis avait repris le business familial. Enfin, repris était un trop grand mot pour déterminer ma situation actuelle. Mais femme d’affaires me servait au moins de couverture pour ne pas finir en prison. Tout comme mon père avant moi d’ailleurs. Seulement, on savait tous que l’entreprise de Roman était loin d’être innocente, et était couverte d’une tonne de soupçons. J’étais finalement plutôt ravie d’apprendre que je n’avais pas été la seule à me rendre en cette ville. Et quand je parle de seule, je parle de connaissances en qui je pouvais avoir confiance, et qui pourraient m’être utile dans mes affaires.

Prenons l’exemple de l’Homme-Mystère. Nate Ashton était un vieil ami, qui remontait de l’époque de la petite école plus ou moins. Je me doutais bien que nos pères respectifs avaient déjà dû se croiser plus d’une fois à Gotham City, avant qu’ils ne meurent tous les deux. C’est par ailleurs de leur alliance que j’ai pu rencontrer le futur Riddler. Sûrement l’homme le plus intelligent que je connaisse. J’ai grandis dans un milieu où il fallait être en permanence rusé. La seule personne qui l’était se trouvait être mon père. Et j’étais entourée d’incapables tels ses hommes de mains, dénués de bon sens. Enfin bon sens, si l’on pouvait appeler cela de la sorte. Disons qu’ils étaient des idiots de première catégorie, ils suivaient simplement les ordres, et leur affaire n’allait jamais plus loin que cela.

J’irais même jusqu’à dire que Nate est plus intelligent que son propre père, l’originale énigme. Parce-que bon, il fallait quand même y aller pour atteindre Enigma. Vous allez sûrement me répondre que c’est normal puisque Nate était son fils, qu’il devait être plutôt proche de lui. Ou du moins, Eddie devait être plus facilement à sa portée qu’à la nôtre. Non pas que j’ai déjà eu l’intention de tuer l’Homme-Mystère, mais disons que cette idée était déjà passée dans l’esprit de Roman Sionis. Un léger bâillement s’échappa involontairement de mes lèvres alors que je scrutais mon reflet dans le miroir. Au bout de plusieurs secondes, insatisfaite, je soufflais.

◄

« J’ai tellement l’air ridicule dans cette tenue. »

Disons que pour la soirée, j’aurais bien voulu être un minimum présentable. Non pas que je ne l’étais pas habituellement, mais quelque chose de plus chic à l’occasion me semblait plus adéquat.

D’une main, je vins rabattre mes cheveux en arrière pour les laisser retomber le long de mon dos alors que je quittais la glace des yeux, jetant un simple sac sur mon épaule. Il fallait dire que je ne voyais pas Nate tous les jours. Et parfois il pouvait me rendre mal à l’aise. A cette idée, un rictus vint se poser au coin de ma bouche. J’étais tellement pathétique. Faible. Je flanchais devant mon propre père rien que lorsqu’il posait les yeux sur ma petite personne. Et l’intelligence du fils du Riddler me déstabilisait complètement. Mais c’était une chose que je me ravisais de lui dire, ou de lui montrer. Ça, c’était un point dans lequel j’étais forte. La manipulation, le mensonge. Il était facile pour moi de cacher la moindre de mes émotions, et rien ne me trahissait. Pour cela que je restais une personne d’un tempérament fort aux yeux des autres, bien qu’intérieurement c’était autre chose.

Non pas de limousine ou autres conneries du genre. J’avais beau avoir hérité de la fortune Sionis, je ne m’amusais pas avec ces choses-là comparé à mon père qui préférait abuser de l’argent. Moi qui aie vécu mon enfance, aux côtés de ma mère, avec pratiquement aucun sou, je restais indifférente et sceptique quant à la richesse que je possédais désormais. Je pourrais dire que je voulais agir en personne banale et civilisée, mais ce serait mentir. Je n’étais rien de tout ça, mais une criminelle recherchée. Et l’Homme-Mystère faisait également partie de cette catégorie-là. Mais disons que, pour une fois, j’allais avoir un semblant de normalité. Mes pas me guidèrent au point de rendez-vous que l’on s’était fixé. Humant l’air frais que je bloquais quelques secondes dans mes poumons avant de relâcher nerveusement, je m’arrêtais en face d’une petite bâtisse et regardais brièvement à travers la vitre. Fronçant les sourcils, je me retournais et regardais autour de moi. Je baissais ensuite les yeux vers mon téléphone portable afin de me renseigner sur l’heure. Bon, j’étais en avance. Je détestais être en avance.